Les Insurgés (Defiance) – de Edward Zwick – 2008
Il faut reconnaître à Edward Zwick un mérite rare : il connaît parfaitement ses qualités et ses limites. Et film après film, le réalisateur trace un sillon, toujours le même, qu’il approfondit et enrichit, sans jamais se répéter, et sans jamais lasser. Zwick, c’est un peu l’héritier des réalisateurs prestigieux de l’âge d’or d’Hollywood, de Victor Fleming à William Wellman, sans le côté touche-à-tout, mais avec un vrai sens du romanesque et du spectaculaire. Et ils ne sont pas nombreux à assumer cet aspect purement hollywoodien, surtout depuis la mort d’Anthony Minghella.
Le film est inspiré d’une histoire vraie, et c’est sans doute la principale réserve qu’on peut lui faire : s’il n’en tire pas un chef d’œuvre (comme Minghella avec Le Patient Anglais, par exemple), c’est probablement parce que Zwick est trop prisonnier de la réalité historique pour signer un vrai grand film romanesque. C’est l’histoire, méconnue, de quatre frères juifs qui deviennent malgré eux des figures de la résistance à l’armée d’Hitler, dans l’Europe de l’Est de 1941. Quatre frères radicalement différents, qui s’aiment et se déchirent, tandis que leur sens du devoir se développe différemment : il y a celui qui estime qu’il faut rester cacher dans cette immense forêt, et recueillir tous les juifs qui se présentent ; puis il y a celui qui trépigne de ne pas passer à l’action.
La réussite du film tient avant tout dans ces personnages, joués avec beaucoup de conviction par Daniel Craig et Liev Schreiber (plus Jamie Bell en jeune chien fou), et dans l’évolution tragique de leurs relations. Si Zwick s’était d’avantage concentré sur ces deux ‘‘meilleurs ennemis’’, plutôt que sur l’ampleur de cette résistance historique, le film aurait sans doute gagné en puissance romanesque.
Pas de quoi gâcher son plaisir, surtout que le ton du film est, en tout cas par moments, d’une cruauté étonnante, évitant un manichéisme qui aurait rendu le film plus confortable, mais bien moins intense. Car les Juifs, ici, ne sont pas tous des victimes passives de la barbarie nazie : les héros du film laissent déverser des torrents de colère et de haine, dont les victimes directes ne sont pas tous des monstres de l’armée hitlerienne. C’est assez gonflé, et franchement réussi.
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